Le
2 mars 1870, une lettre en forme de pétition portant 88
signatures d'habitants de la commune de Saint-Just (les habitants
de la section de Meljac y étant probablement majoritaires)
est adressée au préfet de l'Aveyron.
La Pétition
du 2 mars 1870... |
Pétition
du 2 mars 1670 des habitants de Meljac au Préfet
de l'Aveyron en faveur de la création d'une commune
de Meljac "détachée" de Saint-Just |
Faisant référence à un
discours tenu par le préfet devant le Conseil Général;
discours dans lequel ce dernier aurait fait valoir " les
inconvénients" qu'une commune recouvre plusieurs
paroisses et (sic) "les immenses avantages qui résulteraient
de l'établissement d'une commune pour chaque paroisse
ayant une population suffisante"; "nos drôles
de paroissiens", argumentant sur le fait que Meljac avec
ses 560 habitants dispose déjà "d'une église,
d'un cimetière, d'un presbytère, de deux écoles,
l'une pour les garçons l'autre pour les filles" et
que "la création d'une nouvelle commune pour
cette localité n'entraînerait pas de grandes dépenses".
La "grande raison" disent-ils, "c'est la
grande distance qui les sépare. La commune forme un 8 parfait.
Meljac et Saint-Just se trouvent à chaque extrémité de
ce 8...".
Suivent alors des considérations
sur la distance et les moyens de s'y rendre "à pied, à cheval
ou en voiture", avec le risque, "à pied,
la nuit par un petit sentier à travers les bois et rochers...
de se tuer ou sextropier (sic)..."
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cf.
carte ci-dessus: "...la commune
de Saint-Just forme un 8 parfait. Mejac et Saint-Just
se trouvent à chaque extrémité de
ce 8...leur distance est d'au moins 15 à 16
kilomètres..."
cf. extrait document ci-contre:
"...les habitants soufsignés vous prient et vous supplient très
instamment de les détacher de la commune de Saint-Just..." |
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Plus qu'une pétition
au sens "vindicatif" du terme, c'est d' une supplique
au préfet, d'une prière dont il s'agit: "les
habitants vous prient et vous supplient très instamment..."...L' "Histoire" nous
montre qu'elle n'aboutira pas...ou du moins pas immédiatement.
On ne trouve plus trace aux archives, après cet épisode
de 1870 et ce jusqu'en 1900, d'autres documents témoignant de
velléité de "séparatisme". La révocation
de M. Maffre Hippolyte en novembre 1885 et la démission de M.Enjabert
François en mai 1892 semblent sans rapport avec ce sujet. L'éloignement
du chef-lieu Saint-Just, pour les Meljacois demeure probablement un vrai
handicap sinon un bon alibi.
Datée du 3 octobre 1900, une
convocation adressée par le maire M.Féral pour un conseil
municipal devant se tenir le dimanche 7 octobre à midi à "Castelpers (Maison
Vergnes)", semble lancer (ou relancer?) les hostilités.
S'en suivent alors une série d'échanges de courrier entre
le maire et le préfet, délibérations du conseil
municipal et autre plaintes des conseillers municipaux de" l'opposition" qui
ne se rendent plus aux réunions du Conseil ainsi qu'en atteste
l'extrait ci-dessous des délibérations de la séance
du conseil municipal du 3 mars 1901 ("Saint-Just & Garrigues" par
rapport au groupe "Meljac & Castelpers); autant de tensions" qui
aboutiront à la suspension puis à la révocation
du maire M. Féral Louis, le 28 juillet 1901.
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Il n'est qu'à comparer
la liste des présents à cette séance
du conseil municipal de Saint-Just tenue le 3 mars 1901 à la
liste des conseillers telle qu'elle figure sur le P-V de
l'élection du maire ou de l'adjoint en 1901 (conseillers
issus des élections du 6mai 1900) pour constater
que sont absents 8 conseillers sur 16: Laval, Camboulives,
Vialettes, Maffre, Féral François, Rouvellat
Pierre, Rouvellat François et Naves. Ils n'avaient
pas non plus répondu aux convocations pour les séances
des 16 et 24 février. Deux délibérations
d'importance seront arrêtées ce 3 mars 1901
(cf.plus bas). |
Dans un courrier du 4 janvier
1901(page1&page2)
adressé au préfet par le maire M. Féral,
celui-ci conteste sévèrement les instructions
que lui avait données le préfet dans une lettre
du 19 décembre 1900 (dont nous ne disposons pas); les
qualifiant (sic) "d'injonctions inspirées par
les caprices d'une coterie..." et dénonçant "la
création d'un véritable monopole de la mairie
pour les conseillers municipaux demeurant au chef-lieu (=
St.Just) ou tout près...", il affiche
assez clairement son intention de ne pas se plier aux instructions
du préfet.
Un courrier au préfet (cachet préfecture janvier 1901)
signé "Maffre conseiller municipal à St.Just" dénonce
en 4 pages (pages 1, 2, 3, 4 )la
tenue des réunions du conseil municipal de Saint-Just hors du
chef-lieu, à Castelpers au domicile privé d'un conseiller,
leur fermeture au public, le non-accès aux archives "déposées
dans une maison privée"et l'absence de liberté qui
en résulte. Il demande l'annulation des délibérations
qui y sont prises.
Le même type de plainte a été formulée auprès
du Ministre de l'Intérieur qui demande au Préfet de l'Aveyron
par courrier
du 25 mars 1901 de bien vouloir enquêter sur cette affaire.
Les délibérations
du Conseil Municipal du 3 mars 1901... |
Deux délibérations
sont arrêtées et adressées au préfet
lors du conseil du 3 mars 1901:
- l'une, "demande de transférer à Castelpers le
chef-lieu de la commune de Saint-Just" (page
1 et 2)
- la 2ème,"Le Conseil autorise le Maire à louer
un local de mairie à Castelpers" (1page).
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transfert
chef-lieu à Castelpers (page
1) |
transfert
chef-lieu à Castelpers (
2 ) |
location
local de mairie à Castelpers (1
page) |
"Le Conseil municipal... à l'unanimité des
membres présents... prie M. le Préfet de faire
toutes les diligences nécefsaires pour que le Gouvernement
fafse au plus tôt droit à la demande qu'il fait
qu'à l'avenir la commune de Saint-Just porte le nom
de Commune de Castelpers et que le village de ce dernier
nom en devienne le chef-lieu...": telle est la
manière dont est formulée en conclusion, la
demande contenue dans la 1ère délibération,
de transférer à Castelpers le chef-lieu de
la commune de Saint-Just.
En amont, deux pages d'arguments, "mélange de raison et de
passion"; où l'on trouve un peu "en vrac":
- leur situation géographique et leur nombre d'habitants (St.Just à l'entrême-est
et ses 74 habitants par rapport à Castelpers, et ses 85 habitants,
véritable centre géographique de la commune, plus connu
et plus fréquenté car traversé par 2 routes);
- leur "ancienne richesse historico-architecturale" avec
d'un côté l'ancien couvent des Bénédictins
de St.Just; de l'autre, le fait que "Castelpers tire son nom
d'un vieux château féodal, qui a du avoir une certaine importance,
puisque Richelieu, après la prise de La Rochelle, a cru utile
d'envoyer les soldats de Louis XIII pour le démanteler";
- la qualité des "personnages produits par Castelpers";
en substance, la famille Vergnes avec
François-Charles Vergnes, intendant général des
armées du Ier Empire, député et pair de France et
ses descendants qui se sont illustrés dans la carrière
militaire(dont le Général Pafserieux, à l'époque
Commandant de l'Ecole militaire de Saint-Cyr)ou civile (2 gouverneurs
civils de Madagascar);
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- le fait que les signataires
de cette demande soient conseillers des sections de Castelpers
et de Meljac comptant 793 habitants alors que les sections
de Garrigues et St.Just (dont les conseillers sont absents)
n'en comptent ensemble que 777 et "qu'encore les villages
de Garrigues (99hab.) et de Crestoules (33hab.) s'afsocieraient
pour la plus grande partie à cette demande...";
- les projets enfin de créer "un courrier en voiture
allant, en pafsant par Castelpers, de Lédergues à la future
gare de Naucelle...et...un bureau de poste avec station télégraphique à Castelpers...ces
trois nouvelles créations donneraient à cette localité un
nouveau relief d'importance...".
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Le
Général Pafserieux est enterré au
milieu des siens (famille Vergnes & Tapie de
Celeyran, au cimetière situé au pied
de la chapelle du Roc (photo ci-dessus).
A gauche, photo du "château" de Castelpers.
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Après lecture par le "président
de séance" M. Mouly Antoine (ancien
instituteur de Meljac), d'une lettre du 28 janvier 1901 émise
par le préfet et invitant le Maire à louer à St.Just
un local de mairie, les Conseillers présents, "malgré leur
respect pour la loi et la haute estime qu'ils professent pour
le Préfet..." en clair, décident de
passer outre .
La
2ème délibération de la même séance
du 3 mars 1901 s'inscrit donc dans la logique de la 1ère.
Dès lors que le transfert du chef-lieu de la commune
de St.Just à Castelpers et le changement de dénomination
de la commune ont été demandés et sont
supposés devoir être acquis, il convient que le
Conseil autorise le maire à louer un local de mairie
au "nouveau chef-lieu".
On s'achemine manifestement vers "la rupture entre la mairie et
la préfecture".
Dans un courrier
adressé au préfet en mars 1901, après le Conseil
du 3 mars, M. Féral écrit on ne peut plus clairement "...quant à l'exécution
stricte des instructions que vous m'avez données...elle est impossible
dans la commune de Saint-Just lorsque le maire est éloigné du
chef-lieu..."
Le
15 avril 1901, le préfet, par dépêche télégraphique,
rappelle au maire, en l'occurence M. Féral Louis que
le siège de l'administration municipale est au chef-lieu
de la commune, Saint-Just et que c'est là que doit délibérer
le Conseil municipal.
M. Féral Louis
sera suspendu de ses fonctions de maire de Saint-Just par arrêté préfectoral
du 1er juillet 1901 et révoqué par décret
Présidentiel du 16 juillet de la même année.
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